NewAstv, plus qu'un médium, un compagnon
New AsTV: Une bonne communication grâce au professionnalisme d'une équipe
New AsTV: Vous y êtes, ne naviguez plus
New AsTV pour mieux communiquer en diplomatie
New AsTV: Savourez votre plaisir à communiquer
New AsTV: Ne vous en laissez pas compter
New AsTV: Vous êtes au cœur de l'événement
New AsTV, et la coopération bilatérale devient facteur de développement des peuples
New AsTV: Notre concept, la communication en partage
New AsTV: Partenaire au développement culturel africain

Violences au Kenya : « Le rêve démocratique du pays a échoué »


 Violences au Kenya : « Le rêve démocratique du pays a échoué »
Un policier près d’une barricade en feu dans le bidonville de Mathare, à Nairobi, au Kenya, le 26 octobre 2017. | PHOTO: SIEGFRIED MODOLA/REUTERS
Pour l’historien David Anderson, l’élection présidentielle, qui s’est déroulée dans la plus grande confusion, révèle que « la violence fait partie de l’ADN politique du Kenya ».
 
Un nouveau scrutin présidentiel s’est tenu au Kenya jeudi 26 octobre. Mais le vote s’est déroulé dans la plus grande confusion, entre boycott, bureaux de vote fermés, participation en chute libre, affrontements entre policiers et manifestants et craintes de violences ethniques.
 
Historien et professeur à l’université de Warwick, David Anderson est l’un des meilleurs connaisseurs du Kenya moderne. Il est notamment l’auteur de Histories of the Hanged (Weidenfeld & Nicholson, 2005, non traduit), ouvrage de référence sur l’insurrection des Mau Mau. Il revient sur les causes profondes de la crise kényane.
 
Que vous inspire cette nouvelle élection ?
 
David Anderson On le voit très clairement dans les événements de ces derniers mois : la démocratie kényane est profondément défectueuse. Mais contrairement à ce qu’on pourrait penser, la crise à laquelle fait face le Kenya aujourd’hui n’est pas qu’une crise institutionnelle ou politique. C’est une crise existentielle, qui atteint la nation dans ses fondements. Elle est le résultat de trois décennies de frustrations face à un système démocratique qui n’a pas tenu ses promesses. Vingt-cinq ans après les premières élections multipartites de 1992 et sept ans après l’introduction de la nouvelle Constitution, je crois qu’on peut dire que le rêve démocratique kényan a échoué. Peut-être même est-il mortellement blessé…
 
C’est un constat très dur…
 
Oui. Certes, il existe une société civile active et des institutions plus ou moins indépendantes, comme la Cour suprême. Mais regardez l’état du système démocratique et surtout les hommes politiques qu’il a produits. Uhuru Kenyatta et Raila Odinga sont des leaders sans idéologie, sans programme, sans vision de long terme pour leur pays. Au-delà de la lutte historique de pouvoir entre leurs deux tribus [Kikuyu pour Kenyatta et Luo pour Odinga], aucun d’eux ne souhaite réellement s’attaquer aux problèmes de fond du Kenya. Pendant cette campagne, ni Kenyatta ni Odinga n’ont articulé une vision claire pour l’avenir de la nation.
 
Au Kenya, malheureusement, on entre aujourd’hui en politique pour faire de l’argent et non pour changer la vie. Le pays reste l’un des plus corrompus au monde et les parlementaires sont parmi les mieux payés de la planète. Les Kényans voient la politique comme un monde de peur et de suspicion. Résultat : aux niveaux local et national, le système repose sur le clientélisme. Les électeurs votent non pas pour des idées, mais pour des politiques dont ils souhaitent qu’ils protègent leurs intérêts contre ceux des autres. Une fois au pouvoir, vous remerciez ceux qui vous ont élu. Et c’est tout.
 
Vous dites que cette crise « atteint la nation dans ses fondements ». Pourquoi ?
 
Ces élections l’ont démontré : le Kenya, aujourd’hui, est un pays incroyablement et tragiquement divisé. Le 26 octobre, une large partie de la population, peut-être la moitié, n’est pas allée voter. Ce Kenya-là ne se sent pas représenté par l’Etat. Il voit le gouvernement non pas comme un serviteur mais comme une menace, une force dangereuse, corrompue, absolument pas fiable.
 
Si on regarde la réalité en face, il n’y a guère que les classes moyennes à Nairobi qui se sentent réellement « kényanes ». Elles seules épousent les principes démocratiques mis en avant par la Constitution et font preuve d’un réel patriotisme. Mais elles sont terriblement isolées. Il suffit d’aller dans les marges du pays pour s’en rendre compte : dans les régions éloignées, déshéritées et négligées du Nord-Est somali ou du Turkana, sur la côte musulmane ou sur les terres des Luo dans l’ouest, on ne se sent pas kényan. Et on n’est pas ou peu allé voter le 26 octobre.
 
Plus d’un demi-siècle après l’indépendance, les tensions entre les nombreuses communautés du pays sont toujours aussi fortes. Comment l’expliquez-vous ?
 
Pour comprendre, il faut revenir en arrière. Sous le gouvernement du premier président du pays, Jomo Kenyatta [père d’Uhuru Kenyatta], entre 1963 et 1978, le pouvoir était tenu d’une main de fer par l’élite kikuyu. Mais le « père de la nation » souhaitait malgré tout créer un consensus politique national et évitait de recourir aux violences ethniques. Tout le contraire de son successeur, Daniel arap Moi, au pouvoir de 1978 à 2002.
 
Afin de se maintenir au pouvoir, Daniel arap Moi a ethnicisé à l’extrême la vie politique kényane. A partir du début des années 1990 et la fin de la guerre froide, cet autocrate a dû laisser un peu d’espace démocratique et accepter d’organiser des premières élections multipartites. Afin de remporter les scrutins de 1992 et 1997, il a décidé de chasser ses rivaux du Rift, sa terre natale, en envoyant ses milices à l’assaut des opposants de la région. Le tout a provoqué un terrible nettoyage ethnique pendant une décennie, avec des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.
 
Plus grave encore : cette politique destructrice a monté les communautés kényanes les unes contre les autres et fragmenté la vie politique nationale en groupes ethniques. Chacun s’est replié sur sa tribu pour se défendre contre un Etat dangereux et meurtrier. Le Kenya n’a jamais réussi à se remettre cette ère de terreur et de violence, les responsables de ces crimes n’ont jamais été jugés ou punis, les victimes n’ont jamais été compensées. Et le Kenya vit encore dans l’ombre de cette sinistre dictature.
 
 
Le Kenya est toujours présenté comme un îlot de stabilité dans une région est-africaine en proie à la guerre et à la violence. Est-ce un mythe ?
 
Tout à fait. Contrairement au cliché survendu par les alliés américain et européens de Nairobi, la violence fait partie de l’ADN politique du Kenya. On fait semblant de le redécouvrir à chaque élection. Mais cela remonte à bien plus loin, et d’abord à la colonisation britannique, qui a été d’une violence effroyable, qui a militarisé l’administration et qui fut responsable de crimes de masse dans les années 1950 lors de l’insurrection des Mau Mau [qui aurait fait entre 150 000 et 300 000 morts].
 
Mais après l’indépendance, la violence n’a pas disparu. Au contraire : la liste des atrocités commises au Kenya depuis 1963 est interminable. On pourrait citer la sanglante mais oubliée guerre des Shifta [1963-1967] contre les sécessionnistes somali ; l’assassinat de nombreux leaders politiques ; la torture de milliers d’opposants sous Daniel arap Moi ; le meurtre, depuis l’attentat du Westgate, en 2013, de leaders musulmans soupçonnés de proximité avec les chabab ; le grand nettoyage ethnique du Rift, dont je vous ai déjà parlé ; et bien sûr, les violences post-électorales de 2007-2008, qui firent près de 1 200 morts et 600 000 déplacés. Il faut se rendre à l’évidence : le Kenya est un pays de violence. Et il est grand temps de reconsidérer radicalement notre vision de ce pays.
 

 Commentaires

LIRE AUSSI...

Le saxophoniste Manu Dibango est mort des suites du Covid-19, annoncent ses proches

Le saxophoniste Manu Dibango est mort des suites du Covid-19, annoncent ses proches
Mar 24 Mar 2020 | dans Culture

Le 18 mars, un communiqué publié sur sa page Facebook annonçait son hospitalisation, à la suite d’une infection par le coronavirus.   Ses fans l’appelaient « Papa Manu », « Le Doyen » ou simplement « Manu ». ... Lire la suite >

RDC: l'ex-ministre de la Santé Oly Ilunga condamné pour détournement de fonds

RDC: l'ex-ministre de la Santé Oly Ilunga condamné pour détournement de fonds
Mar 24 Mar 2020 | Source : rfi.fr ... | dans Autres Actus

En République démocratique du Congo (RDC), l’ancien ministre de la Santé Oly Ilunga Kalenga et son ancien conseiller financier Ezechiel Mbuyi Mwasa ont été condamnés ce lundi 23 mars à cinq ans de travaux forcés pour le détournement... Lire la suite >

Lutte contre le terrorisme en Afrique : « La France et les Etats-Unis sont de moins en moins alignés »

Lutte contre le terrorisme en Afrique : « La France et les Etats-Unis sont de moins en moins alignés »
Mar 04 Février 2020 | Source : lemonde.fr ... | dans Autres Actus

Pour Elie Tenenbaum, chercheur à l’IFRI, Washington est moins préoccupé par la menace terroriste que par la présence de la Chine et de la Russie sur le continent.   La ministre française des armées, Florence Parly, a annoncé dimanche... Lire la suite >

Ces millions de dollars que la Libye perd du fait des blocus pétroliers

Ces millions de dollars que la Libye perd du fait des blocus pétroliers
Mar 04 Février 2020 | Source : lepoint.fr ... | dans Economie

PERTE. Fermeture des champs pétrolifères et blocus des ports ont entraîné une perte de plus de 560 millions de dollars, selon la National Oil Corporation.   Au-delà des graves conséquences sur la vie des Libyens, la guerre qui sévit dans... Lire la suite >

L'enlisement français au Sahel questionné

L'enlisement français au Sahel questionné
Ven 24 Jan 2020 | Source : lepoint.fr ... | dans Autres Actus

ANALYSE. Les mesures annoncées lors du sommet de Pau autour du G5 Sahel suffiront-elles à ramener la paix dans la région ? Éléments de réponse.     Lors du sommet qui s'est tenu à Pau le 13 janvier 2020, date du septième... Lire la suite >

« Au Burkina, la chefferie traditionnelle peut restaurer le dialogue et la cohésion sociale »

« Au Burkina, la chefferie traditionnelle peut restaurer le dialogue et la cohésion sociale »
Ven 24 Jan 2020 | Source : lemonde.fr ... | dans Autres Actus

Titinga Frédéric Pacéré est l’un des premiers signataires de « l’Appel de Manega » pour « la paix et la réconciliation » d’un pays durement frappé par les violences djihadistes.     Un dicton... Lire la suite >

Cameroun : Paul Biya reprend l'initiative en libérant le chef de l'opposition

Cameroun : Paul Biya reprend l'initiative en libérant le chef de l'opposition
Dim 06 Oct 2019 | Source : lepoint.fr ... | dans Autres Actus

ANALYSE. Après avoir fait preuve d'intransigeance, le chef de l'État, qui vient d'ordonner la libération de son principal opposant Maurice Kamto et de ses partisans, ainsi que celles de détenus liés à la crise anglophone, semble jouer l'apaisement.   En... Lire la suite >

Le Burkina Faso au bord de l’effondrement

Le Burkina Faso au bord de l’effondrement
Dim 06 Oct 2019 | Source : lemonde.fr ... | dans Société

Une grande partie du territoire échappe désormais au contrôle de Ouagadougou qui commence à peine à sortir du déni face à la multiplication des attaques des groupes armés et des milices dites « d’autodéfense ».   Il... Lire la suite >

Au Burkina Faso, des milliers d’écoles privées de rentrée à cause du terrorisme

Au Burkina Faso, des milliers d’écoles privées de rentrée à cause du terrorisme
Dim 15 Sep 2019 | Source : lemonde.fr ... | dans Société

L’Afrique fait sa rentrée (4). Depuis 2014, le pays est touché par des attaques de plus en plus nombreuses et meurtrières qui ont mis au chômage forcé plus de 9 000 professeurs.     Un petit cahier rouge est posé à côté... Lire la suite >

Affaire des 15 millions de dollars en RDC: malaise à la présidence

Affaire des 15 millions de dollars en RDC: malaise à la présidence
Dim 15 Sep 2019 | Source : RFI Afrique ... | dans Economie

C’est un pavé dans la mare de la rentrée politique congolaise. Depuis plusieurs semaines, l’affaire dite des « 15 millions » de dollars présumés disparus des comptes du Trésor défraie la chronique en RDC et éclabousse la présidence... Lire la suite >

Burkina : Diendéré et Bassolé, le sabre et le velours de Compaoré

Burkina : Diendéré et Bassolé, le sabre et le velours de Compaoré
Mar 03 Sep 2019 | Source : slateafrique.com ... | dans Autres Actus

L'un a servi dans les armes, l'autre dans la diplomatie : condamnés respectivement lundi à 20 et 10 ans de prison au terme du procès du putsch raté de 2015 au Burkina Faso, Gilbert Diendéré et Djibrill Bassolé, généraux aux personnalités... Lire la suite >

Afrique du Sud: la fièvre xénophobe sème le chaos à Johannesburg

Afrique du Sud: la fièvre xénophobe sème le chaos à Johannesburg
Mar 03 Sep 2019 | Source : RFI Afrique ... | dans Société

En Afrique du Sud, ces dernières heures ont été marquées par la violence contre les ressortissants étrangers (africains). Depuis dimanche 1er septembre, des centaines de magasins ont été vandalisés et on compte trois morts, selon autorités... Lire la suite >

Gabon - Demande d'expertise médicale : un peu d'air pour Ali Bongo

Gabon - Demande d'expertise médicale : un peu d'air pour Ali Bongo
Ven 23 Aoû 2019 | Source : afrique.lepoint.fr ... | dans Autres Actus

La juge chargée d'examiner la demande d'expertise médicale formulée par l'opposition gabonaise pour évaluer la capacité du président Ali Bongo à gouverner après son AVC a été suspendue de ses fonctions.   Paulette... Lire la suite >

Au Burkina Faso, l’armée démunie face au péril djihadiste

Au Burkina Faso, l’armée démunie face au péril djihadiste
Ven 23 Aoû 2019 | Source : lemonde.fr ... | dans Autres Actus

Selon le dernier bilan, 24 militaires ont péri, lundi, dans une attaque perpétrée contre une caserne dans la province du Soum.   L’armée du Burkina Faso a connu, lundi 19 août, sa journée la plus noire depuis que ce pays d’Afrique ... Lire la suite >

Gouvernement nigérian: on prend les mêmes et on recommence

Gouvernement nigérian: on prend les mêmes et on recommence
Lun 05 Aoû 2019 | Source : slateafrique.com ... | dans Autres Actus

Le président nigérian Muhammadu Buhari, élu à 76 ans pour un second mandat en février, n'a toujours pas de gouvernement, mais les noms qu'il a soumis au Parlement pour approbation la semaine dernière suscitent déjà la polémique.   Ainsi... Lire la suite >

Du franc CFA à l'éco: l'avenir incertain de la future monnaie ouest-africaine

Du franc CFA à l'éco: l'avenir incertain de la future monnaie ouest-africaine
Lun 05 Aoû 2019 | dans Economie

En théorie, la nouvelle monnaie de la Cédéao, baptisée éco, doit entrer en circulation en 2020. Mais c’est sans compter les difficultés inhérentes à sa mise en place, et aussi les réticences de certains pays de l’UEMOA à... Lire la suite >

Vidéo à ne pas rater

Election au PDCI-RDA/ L?appel de Dimbokro
Ven 22 Déc 2023 | dans: Objectif Développement

Nos Partenaires

NOUS SUIVRE

Qui Sommes-Nous?

New AsTV Le développement par la coopération   Servir de canal numérique au développement de l'Afrique par la coopération. Telle est la vision de New AsTV. De fait, nous nous sommes laissés guider par les relations que l'Afrique...

Lire plus

Contacts

Newsletter

FLASH INFOS